Le HCSP a émis ses recommandations pour les voyageurs se rendant dans un pays ou circule le virus Oropouche
Le 10 décembre 2024, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a mis en ligne son avis relatif à la circulation du virus Oropouche en Amérique latine et dans les Caraïbes, aux recommandations sanitaires pour les voyageurs et à la prise en soins des personnes infectées.
La synthèse des recommandations est reprise ci-dessous.
Le HCSP considère que les zones actuellement à risque d’infection à OROV se sont élargies, bien que la circulation virale soit faible à la date de publication de cet avis. Le risque pour les voyageurs est donc difficile à circonscrire mais pourrait survenir :
- principalement dans les zones amazoniennes d’Amérique du Sud dont la Guyane (avec un risque moindre sur le littoral), le Brésil, la Bolivie, le Pérou et la Colombie, Haïti, la République dominicaine, et à Cuba ;
- dans une moindre mesure en Martinique, en Guadeloupe et dans le reste des Caraïbes, ainsi que dans les autres zones d’Amérique du Sud et centrale ;
- avec un risque faible ou très faible aux États-Unis et au Canada.
Dans l’état actuel des connaissances, le HCSP recommande donc :
- Avant le départ à destination des zones à risque
- de rappeler l’importance des mesures de protections personnelles antivectorielles (PPAV) habituelles ;
- d’éviter les rapports sexuels non protégés avec des partenaires occasionnels durant le séjour ;
- chez les femmes enceintes ou susceptibles de le devenir, de se renseigner sur la situation épidémiologique, d’adopter des mesures de PPAV strictes et de reconsidérer tout voyage non essentiel en cas d’épidémie avérée.
- Pour les femmes enceintes ayant voyagé dans une zone à risque où une épidémie actuelle a été documentée et n’ayant pas présenté de symptômes :
- d’effectuer un suivi de grossesse selon les recommandations habituelles ;
- de ne discuter la réalisation d’un test de RT-PCR et/ou d’une sérologie OROV que chez celles ayant voyagé dans un territoire où sévit une épidémie avérée ;
- en cas de diagnostic d’anomalies fœtales au cours du suivi de grossesse, de rappeler l’importance d’informer l’équipe de soin sur les voyages réalisés et d’orienter la patiente vers un centre de diagnostic prénatal où sera proposée une recherche d’infection à OROV et organisé un suivi spécialisé.
- En cas de survenue de symptômes compatibles sur place ou dans les deux semaines qui
suivent le retour d’une zone à risque où une épidémie actuelle a été documentée :- de consulter en vue d’un bilan diagnostique intégrant la recherche d’OROV (par RT-PCR et/ou sérologie) et de ces diagnostics différentiels.
- en cas de confirmation diagnostique
- de ne pas prendre d’acide acétylsalicylique (aspirine) ni d’autres anti-inflammatoires non stéroïdiens ;
- pour les hommes d’utiliser des préservatifs ou de s’abstenir de rapports sexuels non protégés avec une femme en âge de procréer dans les 6 semaines qui suivent le début des symptômes ;
- de signaler tous les cas d’infection à OROV à l’Agence régionale de santé ;
- pour les femmes enceintes, de les orienter vers un centre de diagnostic prénatal où seront organisés le suivi de la vitalité fœtale et le dépistage d’anomalies morphologiques fœtales ;
- pour les nouveau-nés de mère infectée, d’organiser un suivi pédiatrique spécialisé comprenant un bilan diagnostique (RT-PCR et/ou sérologie) dont la négativité n’exclut pas le diagnostic, un bilan morphologique et, en cas de détection d’anomalies morphologiques, de compléter le bilan étiologique et des complications et d’organiser un suivi pluridisciplinaire ;
- d’envisager l’inclusion des femmes enceintes et des enfants infectés dans une cohorte et/ou un registre dédié.
Rappels sur la maladie à virus Oropouche
Une circulation croissante de l’arbovirus Oropouche (OROV) présent habituellement en Amérique latine a été observée, principalement au cours du premier semestre 2024. Le vecteur principal à l’origine de la transmission du virus est un « moucheron » Culicoides paraensis qui a une activité diurne à crépusculaire. L’implication de vecteurs secondaires (autres espèces de culicidés et des moustiques) est discutée mais non démontrée. Le virus OROV circule entre un cycle selvatique avec différents réservoirs sauvages et un cycle urbain où l’homme est l’hôte principal. Le tableau clinique le plus fréquent, après une phase d’incubation courte, est biphasique avec une phase aiguë et une phase tardive. Des formes neuroméningées ont été décrites. C’est un virus à ARN qui se réassortit fréquemment et dont un réassortant récent (OROVBR-2015-2024) pourrait expliquer l’extension de la zone de circulation et l’émergence actuelle dans de nouvelles zones d’Amérique du Sud et dans les Caraïbes dont Cuba. Se pose également la question d’un risque épidémique et d’un risque d’émergence aux Antilles françaises et en Guyane. Des cas importés ont été signalés aux États-Unis, au Canada et en Europe. Pour la première fois, deux décès ont été notifiés chez des jeunes femmes brésiliennes sans comorbidité connue. De plus, des formes materno‐fœtales ont été décrites, et leur lien avec des morts fœtales in utero et des malformations fœtales suspecté. Le virus a également été isolé dans le sperme d’un homme infecté, ce qui pose la question d’une possible transmission sexuelle. Le diagnostic clinique est complexe compte-tenu des symptômes aspécifiques et communs à la plupart des arboviroses dont la dengue et le virus Zika. Un diagnostic virologique est nécessaire, par reverse transcription-PCR jusqu’au 7ème jour suivant le début des symptômes et/ou par sérologie à partir du 5ème jour. La protection personnelle antivectorielle repose sur les mesures habituelles, à savoir le port de vêtements couvrants, les répulsifs cutanés habituels et l’utilisation d’une moustiquaire imprégnée. Il n’existe actuellement aucun vaccin ni traitement curatif.
Source : Haut Conseil de la santé publique