Les adolescentes toujours insuffisamment vaccinées contre le papillomavirus
Santé publique France a publié le 29 novembre 2022 une étude qui a :
- évalué les couvertures vaccinales contre les infections à papillomavirus (ou HPV, pour Human PapillomaVirus) chez les filles de 15 à 18 ans aux niveaux national (France métropolitaine) et régional (métropole et DROM) en 2021, et les connaissances des parents sur la vaccination,
- exploré les déterminants associés à cette vaccination et
- décrit les raisons de non-vaccination en France métropolitaine.
Cette nouvelle a pour objectif de rapporter les principaux résultats de ce travail qui donne un éclairage actuel sur la vaccination contre les papillomavirus en France.
Cette enquête portait sur un échantillon de personnes âgées de 18 à 85 ans résidant en France et parlant le français. Un questionnaire a été administré par voie téléphonique aux parents de fille(s) âgée(s) de 15 à 18 ans. Toute personne ayant reçu au moins une dose de vaccin était considérée comme vaccinée contre les HPV et les filles de parents n'ayant pas entendu parler de la vaccination ont été considérées comme non vaccinées.
Au total, 34 514 personnes ont été interrogées (24 514 en France métropolitaine et 6 000 dans les DROM) et le taux de participation allait de 44 % (France métropolitaine) à 54 % (Guyane). L'enquête a porté sur 1 289 filles âgées de 15 à 18 ans en France métropolitaine, 92 en Guadeloupe, 56 en Martinique, 104 en Guyane et 168 à La Réunion.
1. Connaissances des parents sur la vaccination contre les infections à HPV
En France métropolitaine, 86,9 % des parents avaient entendu parler de la vaccination HPV ou, de manière plus générale, contre les virus responsables du cancer du col de l'utérus. Ce chiffre était plus faible dans les DROM, variant de 53 % (Guyane) à 71 % (La Réunion).
Chez les pères, 23 % n'avaient jamais entendu parler de cette vaccination, contre 5,4 % des mères.
2. Couvertures vaccinales contre les infections à papillomavirus
EnFrance métropolitaine la couverture vaccinale** globale a été estimée à 43,6 %**. Dans les DROM elle a été évaluée à 14 % en Guadeloupe et 17 % en Martinique, 23 % en Guyane et 24 % à La Réunion. L'enquête n'a pas révélé de différence significative des couvertures vaccinales entre régions métropolitaines, même s'il existait un gradient Nord-Sud avec une proportion de personnes vaccinées plus basse dans le sud, notamment dans les DROM. Il est possible que la taille réduite des échantillons ait masqué des différences existantes.
Les filles de 18 ans étaient mieux vaccinées (49 %) que celles de 15 ans (39 %), ou lorsque leurs parents avaient entendu parler de la vaccination (47 %). Cette proportion est en accord avec les données de l'assurance maladie (47 %).
3. Déterminants des couvertures vaccinales contre les infections à papillomavirus chez les filles de 15 à 18 ans en France métropolitaine
La couverture vaccinale était plus élevée chez les filles avec des parents :
- à haut revenus ou se considérant comme aisés (59 %) ;
- avec un niveau d'étude élevé (60 % pour des parents de niveau supérieur ou égal à bac + 5 contre 37 % pour des parents ayant un diplôme inférieur au bac).
- de nationalité française de naissance (46 % contre 24 % pour des parents de nationalité française acquise ou 31 % pour des parents étrangers).
4. Quelles sont les raisons de non vaccination évoquées par les parents dont au moins une fille n'est pas vaccinée ?
- La dangerosité du vaccin et la peur des effets indésirables est retenue par 20 % des parents et reste la cause principale de non vaccination. Même si les études de sont pas comparables, ce taux parait diminuer progressivement : estimé à 50 % en 2016, il variait encore de 37 % à 53 % en 2019 selon l'âge de la fille du parent interrogé.
- La deuxième raison citée est l'absence d'information (14 %) : le vaccin n'avait pas été proposé par le médecin (10 % des cas) et dans 3,6 % des cas le parent interrogé n'avait pas entendu parler ou ne se considérait pas informé sur le vaccin contre les papillomavirus. Ce facteur est cité avec la même fréquence qu'en 2016.
- Le troisième motif de non vaccination cité est de considérer ce vaccin comme inutile , ne se sentant pas concerné par le risque d'infection à papillomavirus (8,2 %).
- Trois autres causes de non vaccination méritent d'être rapportées : dans 6,1 % des cas les parents ont dit que la vaccination avait été déconseillée ou contre-indiquée par leur médecin, dans 6,2 % ils étaient opposés au vaccin HPV et dans 8 % des cas ils avaient fait le choix de ne pas faire vacciner leur fille.
Si une attitude médicale préjudiciable demeure fréquente (absence d'information des parents (10,1 %) ou vaccination déconseillée ou contre-indiquée par le médecin (6,1 %), une amélioration est notée par rapports aux enquêtes antérieures. En 2016, une étude avait montré que 63 % des médecins ne proposaient pas la vaccination HPV, ces taux variant de 27 à 39 % dans une enquête de 2019 selon l'âge de la fille.
Les auteurs concluent que, malgré une amélioration de la couverture vaccinale contre les infections à HPV chez les filles en France, celles-ci restent loin de l'objectif de 60 % posé par le plan cancer 2014-2019 et parmi les plus faibles d'Europe, notamment dans les populations les moins favorisées économiquement. Ces résultats invitent à renforcer les actions de promotion et d'incitation à la vaccination globalement, mais également plus spécifiquement auprès de ces populations en vue de réduire les inégalités de santé.
D'autres freins à la vaccination sont par ailleurs discutés :
- Les vaccins anti-HPV étant remboursés à 65 % par l'assurance maladie, l'absence de mutuelle complémentaire ou de CMU-C constitue un obstacle à la vaccination. Les centres de vaccination publique, les Cegidd et les centres de planification familiale offrent une solution au frein financier, mais leur accès géographique est limité et les campagnes de vaccination gratuites sont rares.
- En France, la vaccination HPV est dite opportuniste (elle relève d'une démarche active du patient), et en particulier il n'y a pas de politique de de vaccination scolaire couplée à des actions d'éducation pour la santé.
Source : Santé publique France.