La protection par le vaccin anti-papillomavirus doit progresser en France

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En 2008, Harald zur Hausen, médecin et virologue allemand, a reçu le prix Nobel de médecine pour sa découverte du rôle des papillomavirus dans le déclenchement du cancer du col de l’utérus. Le prix récompensait des recherches commencées dans les années 1970, qui ont été les premières à établir l’origine infectieuse de certains cancers. Dès les années 1980, le virologue a cherché à mettre au point un vaccin contre les papillomavirus, susceptible de protéger contre l’apparition du cancer. Ses travaux ont abouti en 2006 à la mise sur le marché d’un premier vaccin.

Les conséquences d’une infection par les papillomavirus sont bien connues aujourd’hui. On identifie plus de 200 types de papillomavirus infectant l’Homme (Human Papillomavirus ou HPV). La plupart de ces virus, transmissibles par contact cutané, donnent des infections bénignes ou inapparentes, ils peuvent être responsables de verrues. Quelques-uns se transmettent lors des rapports sexuels et provoquent alors des lésions connues sous les noms de verrues génitales, condylomes acuminés ou crêtes de coq. Lorsqu’elles sont dues à certains génotypes, surtout les génotypes 16 et 18, ces lésions initialement bénignes évoluent en quelques années, dans quelques cas, en lésions pré-cancéreuses puis en cancers. Celui du col de l’utérus est le plus fréquent, et il a été la cible initiale des recommandations des vaccins anti-HPV. Pour être protectrice, l’immunité doit être acquise avant la première rencontre avec l’un des virus, et donc en pratique avant les premiers rapports sexuels, pour empêcher l’infection et l’insertion de l’ADN viral dans les cellules. Le vaccin a donc été recommandé pour les jeunes filles âgées de 11 à 14 ans, avec rattrapage possible de 15 à 19 ans.

Partout où le vaccin a été utilisé, son efficacité a été démontrée. On a constaté tout d’abord chez les femmes immunisées la diminution de l’incidence des verrues génitales (qui apparaissent rapidement après une infection), puis il a fallu plusieurs années pour constater celle des lésions précancéreuses et des cancers, dont le développement, quand il a lieu, est bien plus long.

Mais on sait à présent que les papillomavirus peuvent être responsables d’autres cancers, au niveau des organes génitaux (vulve, vagin, pénis), de l’anus, et également de l’oropharynx. En tout, ce sont environ 6000 de ces cancers qui sont déclarés en France annuellement. La prévention des cancers dus aux HPV ne doit donc pas s’adresser qu’aux femmes. On a pensé, lorsque la vaccination a commencé, qu’en se généralisant à toutes les jeunes filles, elle allait diminuer la circulation des virus et protéger ainsi les garçons, mais cet effet est insuffisant. Il est donc à présent envisagé partout de vacciner filles et garçons à l’adolescence. En France, depuis le 1e janvier 2021, le vaccin est ainsi recommandé pour tous entre 11 et 14 ans, le rattrapage restant possible jusqu’à 19 ans révolus. Une recommandation existe également, jusqu’à l’âge de 26 ans, pour les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, en prévention des condylomes et des lésions anales précancéreuses et cancéreuses. Car s’il est bien établi que la protection est maximale avant tout contact avec le virus, la vaccination reste bénéfique après le début de l’activité sexuelle puisqu’elle peut éviter des réinfections.

Une nouvelle indication retenue le 8 novembre 2022 est la prévention de la papillomatose respiratoire récurrente (PRR) juvénile, réalisée par la vaccination des filles et des femmes en âge de procréer. La PRR est une maladie rare, où des verrues provoquées par un HPV (surtout HPV 6 et HPV 11) se développent dans les voies respiratoires et peuvent les obstruer. La forme juvénile, qui touche les enfants jusqu’à l’âge de 12 ans, est la plus souvent compliquée. Bien que les voies de contamination soient mal identifiées, la vaccination des futures mères apporterait une certaine protection.

Les études de sécurité des vaccins anti-HPV ont été menées dans les deux sexes et leurs résultats sont rassurants. Les effets indésirables sont comparables à ceux des vaccins de même catégorie (vaccin sous-unité, inerte et contenant un adjuvant) : il s’agit d’effets le plus souvent locaux, bénins et résolutifs. Comme avec tout vaccin ou médicament, des effets généraux et plus graves sont possibles (en particulier, des réactions allergiques) mais ils sont rares. Il a été montré que les vaccins anti-HPV ne favorisaient pas l’apparition de maladies auto-immunes et de la sclérose en plaques.

L’efficacité est également démontrée contre tous les types de HPV contenus dans le vaccin. Elle est obtenue avec le vaccin Cervarix contre les génotypes 16 et 18, les plus souvent associés aux cancers, mais elle est plus étendue avec la formule nonavalente de Gardasil 9, qui protège non seulement contre les génotypes 16 et 18, mais aussi contre 6, 11, 31, 33, 45, 52 et 58, surtout responsables de verrues, condylomes ou de la PRR.

La Stratégie nationale de santé sexuelle voulue par nos autorités a fixé en 2017 un objectif de 60 % de jeunes filles vaccinées contre le HPV en 2023, et de 80 % en 2030. Cet objectif est loin d’être atteint, et la France a pris du retard sur la plupart des pays industrialisés. Une accélération et une extension de la vaccination sont donc nécessaires, et c’est l’objet de la décision, publiée le 7 mars 2023, de proposer gratuitement le vaccin Gardasil 9 à tous les élèves de 5e des collèges à partir de la rentrée 2023. Ce sont ainsi 800 000 jeunes qui pourraient être protégés tous les ans.

Les effets de ces mesures sur l’incidence des cancers induits par les HPV devraient être perceptibles dans plusieurs années. Quoi qu’il en soit, elles ne dispensent pas de la nécessité du dépistage systématique du cancer du col de l’utérus par frottis cervico-vaginal pour toutes les femmes âgées de 25 à 65 ans, vaccinées ou non. Ce cancer peut en effet avoir d’autres origines que les HPV contenus dans le vaccin, ou celui-ci peut avoir été administré alors que l’infection a déjà eu lieu, auquel cas il n’apporte pas de protection.

Références

  1. Papillomavirus : faut-il généraliser la vaccination ?
  2. Le vaccin contre le papillomavirus.
  3. Papillomavirus : vaccination généralisée à la rentrée 2023 pour les élèves de 5e.
  4. Stratégie nationale de santé sexuelle, agenda 2017 – 2030.

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